Saint Zacharie

Fête le 5 novembre


Zacharie issu de la famille d’Abias appartenait à la tribu sacerdotale de Levi, et selon la coutume introduite chez le peuple juif, il chercha une compagne parmi les filles d’Aaron, il eut le bonheur et la grâce de choisir Elisabeth, parente de la sainte Vierge.

Le Saint-Esprit nous fait dans la Sainte-Ecriture la description de ce ménage : « Ils étaient tout deux justes devant le Seigneur, marchant dans le chemin de tous ses commandements, et selon les prescriptions de la loi sine querela, sans donner lieu à aucune plainte. »

Cependant, aux yeux du monde le mariage n’avait pas été béni, on le réputait presque malheureux, car Elisabeth n’avait point d’enfants et la stérilité était réputée avec une honte chez le peuple juif. Les époux subirent l’opprobre de l’opinion avec patience, ils savaient que Dieu était avec eux, et comme les saintes femmes de la Bible, auxquelles le Seigneur fit attendre un fils pour la naissance duquel il voulait de longues prières, elle priait et offrait l’épreuve.

Or il arriva que le sort désigna le prêtre Zacharie pour pénétrer dans le Saint des saints et offrir le sacrifice ; chaque semaine le lévite chargé de cette sainte mission était désigné de cette façon.

A l’heure du sacrifice, il était donc entré dans le temple pour remplir ses fonctions, tenant l’encens et la foule des fidèles se pressait au dehors afin d’unir ses prières à celles du prêtre.

C’est ordinairement lorsque les esprits sont ainsi tournés vers Dieu que le Seigneur manifeste ses grâces. A l’heure donc de la prière et du sacrifice, l’ange Gabriel apparut debout à droite de l’autel des parfums et Zacharie fut effrayé.

- « Ne craignez point, dit l’ange, votre prière a été exaucée, Elisabeth, votre épouse, enfantera, elle aura un fils et vous le nommerez Jean. Vous serez dans la joie et le ravissement, et beaucoup se réjouiront de sa naissance, car il sera grand devant le Seigneur. Il ne boira ni vin, ni liqueur enivrante et il sera rempli du Saint-Esprit dès le sein de sa mère. Il convertira plusieurs enfants d’Israël au Seigneur, leur Dieu, et il marchera devant lui dans l’esprit et la vertu d’Elie afin d’unir les cœurs des pères à ceux des fils, de ramener les incrédules à la sagesse des justes, et de préparer au Seigneur un peuple parfait. »

Cette nouvelle dépassait si extraordinairement les espérances du prêtre à l’heure où la vieillesse d’Elisabeth ne lui donnait plus l’espoir d’être père, troubla sa foi ; comme Sarah, il hésita, et comme elle il en sera réprimandé.

A quel signe, demanda-t-il, reconnaîtrai-je que cela doit arriver ainsi, je suis déjà vieux et ma femme est avancée en âge. Le signe ne se fit pas attendre.

- « Je suis Gabriel, répondit l’ange, je me tiens devant Dieu, et j’ai été envoyé pour vous parler et vous annoncer cette bonne nouvelle, et voilà que vous serez muet et vous ne pourrez plus parler jusqu’au jour où ces choses arriveront ; il en sera ainsi parce que vous n’avez pas cru à mes paroles qui s’accompliront en leur temps. »

Et sa langue fut nouée.

Cependant la foule impatiente s’étonnait que le prêtre demeurât si longtemps derrière les voiles du Saint des saints, et l’on disait : il y a quelque chose d’extraordinaire.

Aussi, dès que Zacharie sortit on l’entoura pour lui demander ce qui était arrivé, et lui aurait voulu répondre, mais il ne put articuler une parole, et à ce spectacle et aux signes qu’il faisait, le peuple éprouva le sentiment que quelque chose s’était accomplie.

Cependant le temps de son ministère sacerdotal étant achevé, Zacharie céda l’encensoir à celui que le sort appelait à lui succéder et rentra dans sa maison : Elisabeth conçut dans sa vieillesse et ils partirent vers les montagnes, en leur maison d’Hébron, cacher au regard des hommes le secret du miracle.

Zacharie et Elisabeth dans cette retraite rendaient grâce au Seigneur, et pendant cinq mois, les hommes ignorèrent la faveur dont ils étaient l’objet et sans doute déjà ils disaient la parole qui sera répétée à la naissance : que sera donc cet enfant ?

Au bout de cinq mois, l’ange Gabriel descendit de nouveau sur la terre et il se présenta à Nazareth à la Vierge Marie :

Voici, disait le messager du Ciel, que vous concevrez un fils et vous l’appellerez Jésus.....

- Comment puis-je devenir mère ? avait répondu la Vierge bénie entre toutes les femmes.

- L’Esprit Saint descendra en vous et la vertu du Très Haut s’étendra sur vous, et ce qui naîtra de vous sera le fils de Dieu.

Or, elle ne demanda aucun signe de la vérité de cette étonnante nouvelle, mais l’ange le lui donna :

- Voici qu’Elisabeth ta parente a, elle aussi, conçu un fils en sa vieillesse, et celle qui était stérile est mère depuis six mois, car rien n’est impossible à Dieu.

Et aussitôt, dit le texte sacré, Marie partit vers Hébron pour voir sa cousine Elisabeth auprès de laquelle l’ange l’avait conviée à se rendre.

Ce fut un grand événement que l’arrivée de la mère du Sauveur auprès de la mère de Jean-Baptiste. L’Evangile nous raconte tout au long l’histoire de cette visite merveilleuse que l’Eglise célèbre sous le nom de la Visitation et où la sainte Vierge faisant déjà éclater sa puissance, par sa seule parole délivra Jean-Baptiste de la souillure originelle.

L’Ecriture, en retraçant cette scène magnifique, ne fait pas mention de Zacharie. Il y assista cependant. Il comprit au tressaillement de son fils dans le sein maternel, que la mère des vivants était venue visiter sa demeure ; mais son mutisme persistant, l’empêcha de joindre ses accents à ceux d’Elisabeth.

L’heure approchait néanmoins où les promesses du ciel allaient, se réalisant dans leur plénitude, permettre à Zacharie de rompre le silence.

Lorsque le temps de l’enfantement fut arrivé, Elisabeth mit au monde un fils. A la nouvelle de cet événement inattendu, les voisins et les parents qui ne connaissaient point la prédiction de l’ange et n’avaient pu pénétrer le secret de la Visitation, vinrent en foule admirer la merveille qui s’accomplissait en la nativité de saint Jean-Baptiste, et ils faisaient éclater leur joie en bénissant le Seigneur.

Le huitième jour, ils se réunirent pour circoncire le nouveau-né, et, d’un commun accord ils l’appelèrent Zacharie du nom de son père. Mais Elisabeth s’opposa vivement à ce choix, et, d’une voix inspirée elle répondit : « Non, on l’appellera Jean. »

Cette résistance imprévue provoqua une profonde surprise dans l’assemblée et l’on se récria en disant : « Il n’y a personne dans la famille qui porte ce nom. »

Zacharie le père de l’enfant, assistait à la contestation et, malgré la prérogative attachée à l’autorité paternelle, son mutisme l’empêchait de donner son avis. On résolut de le choisir pour juge du conflit et on l’interrogea par signe pour connaître le nom qu’il voulait donner à l’enfant.

Mais lui, demandant des tablettes écrivit : «  Jean est le nom qu’il doit porter. »

Au même instant, alors qu’autour de lui on s’étonnait de cette résolution étrange, sa bouche s’ouvrit tout à coup, sa langue se délia, et il parla en bénissant le Seigneur.

Ce nouveau prodige, qui venait s’ajouter à toutes les merveilles de la naissance miraculeuse de Jean-Baptiste, frappa d’effroi les assistants, et ils se retirèrent pleins de respect pour l’enfant que Dieu prédestinait d’une manière si éclatante.

Le bruit de ces événements se répandit dans toute la contrée et les échos redirent aux montagnes de Judée, la gloire de Jean-Baptiste.

En cette journée bénie, les merveilles succédèrent sans interruption aux merveilles, et le père de l’enfant, Zacharie, en présence de la nombreuse parenté accourue pour les fêtes de la Circoncision fut tout à coup saisi de l’Esprit-Saint, et, d’une voix prophétique entonna le Benedictus. Ce cantique de joie et d’espérance a mérité l’honneur d’être reproduit tout entier par l’Evangile, et l’Eglise le fait réciter chaque jour à ses religieux et à ses clercs.

Il appartenait au père de Jean-Baptiste de résumer toutes les prophéties au moment où leur accomplissement était si proche, et, en présence du précurseur et de la mère du Christ, d’annoncer la venue prochaine du Messie. La Sainte Vierge assistait en effet à la naissance de Jean-Baptiste, si nous nous en rapportons au témoignage de la plupart des pères et des docteurs. Aussi l’iconographie a-t-elle plus d’une fois représenté la mère de Dieu portant le Précurseur entre ses bras, ce qui fait dire : « Jamais plus bel enfant eut-il plus belle porteuse ! » à saint Bonaventure.

Zacharie chantait : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël de ce qu’il a visité et racheté son peuple et nous a suscité une corne de salut dans la maison de David, comme il l’a promis dès les temps les plus reculés par la bouche de ses saints prophètes. »

Puis, s’adressant au nouveau-né, dont la mission extraordinaire avait été dévoilée par tant de miracles, il ajouta : « Et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut et tu marcheras devant la face du Seigneur pour lui préparer les voies, pour donner au peuple la science du salut, et pour la rémission de ses péchés par les entrailles de la miséricorde divine ; avec lesquelles est venu nous visiter le soleil se lever d’en haut, pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et l’ombre de la mort, et diriger nos pas dans la voie du salut. »

Par une permission du ciel, Zacharie dont le mutisme avait été le premier indice des grands événements qui allaient s’accomplir, dévoilait par un chant inspiré, les secrets de la Providence divine.

Ainsi sa parole aussi merveilleuse que son silence, préludait à l’apostolat de Jean-Baptiste en indiquant le chemin que suivrait le précurseur pour préparer les voies de Dieu.

La mission de Zacharie était remplie, Jean-Baptiste apparaissait au milieu des hommes et le monde attendait le Sauveur, dont le père du Précurseur avait chanté la venue prochaine.

Dès ce moment l’Evangile ne fait plus mention de Zacharie et on est obligé de recourir aux légendes populaires pour compléter sa vie.

Si l’on accepte une tradition fort répandue en Orient, et appuyée sur l’autorité de plusieurs pères de l’Eglise, à l’époque du massacre des Innocents, Elisabeth, avertie elle aussi par un ange, prit son enfant entre ses bras et s’enfuit la nuit dans les montagnes. Après une longue course, elle s’arrête épuisée de fatigue, sans ressources et sans abri, elle ne douta point de la Providence divine, et comme un pic escarpé se dressait devant elle et l’empêchait de passer, d’une voix inspirée elle s’écria : « Montagne de Dieu, recevez-moi avec mon fils. » A ces mots, la montagne s’entr’ouvit avec respect devant la mère et l’enfant qu’elle cacha dans son sein, et un ange, éclatant de lumière, descendit dans cette demeure improvisée pour être le gardien du Précurseur (1).

Cependant les satellites d’Hérode arrivèrent à la maison de Zacharie, et ils réclamèrent le nouveau-né. Zacharie se trouvait ce jour-là dans le temple, et il était auprès de l’autel occupé à son ministère. Hérode le fit saisir par ses soldats et comparaître devant son tribunal. Il le somma d’indiquer le refuge qu’avait trouvé son fils. Zacharie refusa de répondre, et comme les menaces et les promesses étaient impuissantes à vaincre son silence obstiné, les soldats le conduisirent au temple, et ne reculant point devant ce dernier sacrilège, ils le tuèrent dans le vestibule de l’autel.

Le peuple attendit le pontife et, comme on ne le voyait point revenir, il entra dans le temple et il ne trouva que le cadavre de Zacharie.

L’Eglise grecque honore Zacharie le 5 septembre comme un prêtre, un prophète et un martyr. En occident la fête a été fixée au 5 novembre, et dans plusieurs églises on célèbre sa mémoire le même jour que celle de sainte Elisabeth.

L’Occident a le bonheur de posséder les reliques du père de Jean-Baptiste et, chaque année, le pèlerinage national de France à Rome peut aller vénérer à Venise le corps de saint Zacharie. Sa tête se trouve à Rome dans l’église de Saint-Jean de Latran, et Baronius rapporte que plusieurs fois il en est sorti du sang.

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(1) Nous représentons, dans la vie de Ste Elisabeth, la copie d’une antique miniature du neuvième siècle qui vient à l’appui de cette tradition.

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