Saint Hilaire

Fête le 14 janvier

Evêque et docteur


Conversion d’Hilaire

La ville de Poitiers s’enorgueillit avec raison d’avoir donné le jour à saint Hilaire, et d’avoir, selon l’expression de saint Augustin, vu se lever en son sein l’astre éclatant qui devait plus tard illuminer l’Eglise de Dieu. Sa famille brillait parmi toutes les autres, non seulement par la splendeur de son rang, mais encore par la renommée de sa vaillance. Malheureusement, elle était païenne : Hilaire fut donc élevé au milieu de l’erreur, mais parmi la corruption des mœurs contemporaines, il conserva toujours un cœur droit, et mena toujours une vie honnête et pure, consacrant son temps à l’étude de la philosophie, de l’éloquence et de la poésie.

Il était déjà arrivé à l’âge mûr, lorsque la grâce divine, qui l’avait éloigné peu à peu de la religion de son enfance, lui fit voir clairement l’inanité des doctrines du paganisme. Alors, sa conversion fut complète, et son exemple fut suivi par sa femme et Abra, sa fille. A partir de ce jour, il éprouva une horreur si profonde pour les ennemis de la religion catholique, qu’il refusait de s’asseoir à la même table qu’eux ; et même il ne leur rendait pas leur salut quand il les rencontrait sur le chemin. D’autre part, il exhortait les fidèles à la pratique persévérante de la vertu, et ne cessait pas, nous dit son historien Fortunat, de semer dans le peuple des paroles de vérité qui faisaient fructifier la foi.

Hilaire évêque

Sur ces entrefaites, l’évêque de Poitiers mourut. Hilaire, quoique laïque, fut élu pour le remplacer, par le suffrage unanime du clergé et du peuple, et sacré du consentement de sa femme : dès lors tous deux se séparèrent pour vivre en continence.

C’était sous le règne de l’empereur Constance. L’hérésie arienne, qui niait la divinité de Jésus-Christ, forte de la protection impériale, étendait partout ses ravages, en infiltrant malicieusement son venin dans les cœurs des fidèles. Constance lui-même était Arien, et persécutait ceux qui demeuraient inébranlables dans la pureté de leur foi. Plusieurs évêques ambitieux soutenaient l’erreur de leur crédit ; à leur tête on remarquait principalement Ursace et Valens.

Hilaire s’avança dans la mêlée, comme un vaillant porte-étendard, et ne quitta plus le champ de bataille jusqu’à son dernier soupir.

Dans un concile, tenu à Milan, l’empereur avait mis tout en œuvre pour détruire la foi de Nicée, qui était celle de l’Eglise catholique, et extorquer aux évêques la condamnation de saint Athanase, l’adversaire le plus terrible de l’arianisme. Les légats du Saint-Siège lui représentèrent qu’il était absolument contraire aux lois de l’Eglise de condamner un absent sans l’entendre.

« Les lois, répliqua Constance, ce sont mes volontés. » Mais les légats et plusieurs évêques se laissèrent condamner eux-mêmes à l’exil, plutôt que d’accepter une maxime aussi tyrannique, et de trahir d’une manière aussi odieuse la cause de la justice.

Hilaire aurait pu vivre en repos dans son Eglise de Poitiers : pour cela il n’avait qu’à laisser à d’autres le soin de défendre la vérité, et à garder le silence ; par ce moyen, il aurait aussi gagné la faveur impériale. Mais il n’hésita pas un instant sur le parti qu’il avait à prendre : « J’adhère, dit-il, au nom de Dieu et de mon Seigneur Jésus, dût une telle confession m’attirer tous les maux ; je repousse la société des méchants et le parti des infidèles, lors même qu’ils m’offriraient tous les biens. » Il adressa donc à l’empereur un plaidoyer hardi et courageux, au nom de tous les évêques des Gaules, contre la violence des Ariens.

La fermeté de son langage lui mérita toute la haine des hérétiques. Saturnin, évêque d’Arles, leur partisan, de concert avec Ursace et Valens, qui avaient été énergiquement flétris dans la requête à l’empereur, ouvrit un concile à Béziers, pour y juger et condamner les évêques demeurés fidèles. Hilaire s’y rendit. Au milieu de cette assemblée d’ennemis, il se leva avec son intrépidité ordinaire, et proposa de réfuter, séance tenante, leur pernicieuse erreur. Les Ariens, stupéfaits d’une pareille hardiesse, craignirent d’être confondus publiquement, et refusèrent de l’écouter.

Hilaire confesseur de la foi

Ils ne s’arrêtèrent pas dans la voie de l’injustice : ils l’accusèrent auprès de l’empereur d’un crime indigne, non seulement d’un évêque, mais encore d’un laïque de bonnes mœurs. Hilaire, victime de cette odieuse calomnie, fut exilé en Phrygie, mais il ne laissa point, du fond de son désert, d’être l’âme des églises des Gaules, et de gouverner son diocèse par ses lettres et ses instructions, car les évêques fidèles ne permirent jamais qu’on remplaçât sur le siège de Poitiers l’illustre confesseur.

Hilaire trouva l’Orient tout infecté du poison de l’hérésie : lui-même assure que dans les provinces où l’injustice impériale l’avait relégué il y avait à peine un évêque qui eût consacré quelques restes de la saine doctrine. Dans ces circonstances il s’imposa deux principaux devoirs qui montrent sa sainteté et son amour des âmes : il s’appliqua d’abord à se maintenir inébranlable dans la confession de Jésus-Christ, et ensuite à ne rejeter aucun moyen honnête et raisonnable de pacifier les choses. Dès lors il usa de ménagements dans les écrits qu’il composa, et poussa même la condescendance jusqu’à parler avec les hérétiques et leur donner le salut et le baiser de paix. Ainsi la conduite austère qu’il avait tenue à leur égard, alors qu’il était simple laïque, ne provenait pas de la dureté de son caractère, puisqu’il redevint indulgent et miséricordieux, quand cela fut plus utile à l’Eglise et à son prochain.

L’époux mystérieux

A cette époque le Saint-Esprit révéla miraculeusement à Hilaire que la main de sa fille, Abra, était recherchée par un jeune homme de haute lignée et d’une rare beauté. La tendresse paternelle, s’unissant dans son cœur à l’amour surnaturel du prêtre et de l’évêque, s’alarma à cette nouvelle. Il écrivit aussitôt, du lieu de son exile, une lettre qui respire le charme le plus suave et la piété la plus tendre : « Diffère, je t’en prie, lui mandait-il, l’exécution de tes projets jusqu’à mon retour. Je t’ai choisi, m’a bien-aimée Abra, un époux dont la noblesse est aussi élevée que le ciel, dont la beauté surpasse l’éclat du lis et de la rose, dont les regards sont brillants comme des pierres précieuses, dont les ornements sont d’une splendeur inouïe, dont les vêtements triomphent de la blancheur de la neige, dont les richesses ne pourraient être renfermées dans des royaumes entiers. Sa sagesse est incompréhensible, sa douceur laisse bien loin derrière elle les rayons de miel, sa pudeur est invulnérable, ses trésors sont inamissibles.

Le prince offre à sa fiancée une robe dont le tissu est d’une simplicité incomparable, une perle auprès de laquelle les diamants de la terre, les magnificences de la nature, l’astre rayonnant des cieux perdent tout leur éclat. Mais la robe n’aurait plus sa vertu le jour où on l’échangerait contre une étoffe plus somptueuse ; et la perle ne saurait être associée aux bijoux de la terre sans s’évanouir et disparaître.

Donc, fille chérie, lisez et relisez cette lettre ; prenez pitié de mes angoisses et réservez-vous uniquement pour cette parure et cette perle ; Répondez-moi en consultant votre cœur. Quand je saurai votre détermination, je vous ferai connaître la volonté et le nom de cet inconnu. S’il arrivait que votre jeunesse ne pût démêler le sens de cette lettre, demandez-le à votre mère qui, je le sais, désire par-dessus tout vous avoir engendrée pour Dieu. Fille très regrettée, que ce grand Dieu qui vous a donné la vie daigne vous garder ici-bas et dans l’éternité. »

La jeune Abra reçut avec un bonheur ineffable la lettre de son père. Elle faisait des vœux et des prières pour son prompt retour : les mois lui semblaient des siècles. Nous verrons plus tard quel était ce prince mystérieux à qui saint Hilaire voulait la fiancer.

Hilaire et la vierge Florence

L’illustre évêque de Poitiers était en exil depuis quatre ans, lorsque l’empereur Constance donna à ses officiers l’ordre général de convoquer tous les évêques, sans faire la mention toute spéciale d’Hilaire, pour un concile qui devait avoir lieu à Séleucie. Le gouverneur de la province, oubliant qu’il était dans la disgrâce de l’empereur, l’obligea à s’y trouver et lui fournit même un char pour le voyage.

Passant un jour de dimanche par une petite ville dont l’histoire ne nous a pas conservé le nom, il entra dans l’église des catholiques à l’heure où le peuple était rassemblé pour la prière. Tout à coup du milieu de la foule s’élance une jeune fille, elle pénètre les rangs pressés, elle s’écrie qu’un grand serviteur de Dieu est là et, prosternée aux pieds d’Hilaire, elle le conjure de l’associer au troupeau de Jésus-Christ par un signe de croix.

C’était la jeune païenne, Florence, qu’un mouvement de l’Esprit-Saint poussait vers le grand docteur. Hilaire lui donna sa bénédiction, lui promettant de l’instruire des vérités de la foi et de la baptiser au nom du Christ. La pieuse enfant ne jouit pas seule de ce bonheur : toute sa famille éclairée par les paroles d’Hilaire, fut régénérée avec elle dans l’eau sainte du baptême.

A partir de cet instant, Florence ne quitta plus celui qu’elle appelait son père et qui, disait-elle, lui avait donné une vie mille fois plus précieuse que la vie du corps. Elle s’attacha à tous ses pas et sous sa direction parvint à une telle sainteté qu’elle mérita d’être élevée sur les autels.

Hilaire en face des évêques ariens et de l’empereur

Hilaire put siéger au concile de Séleucie avec les autres évêques. Il eut la douleur d’entendre des blasphèmes horribles sortir de la bouche des Ariens, hommes lâches devant les princes de la terre, hardis contre Dieu seul, refusant au fils de Dieu l’attribut d’éternel qu’ils donnaient à l’empereur.

Les semi-Ariens eux-mêmes, animés par l’exemple du docteur intrépide des Gaules, condamnèrent l’hérésie arienne et déposèrent les infidèles qui la prêchaient. Mais ces impies en appelèrent à Constance, les uns et les autres allèrent à Constantinople, comme si Notre-Seigneur avait dit à ses apôtres : Lorsque vous serez embarrassés sur quelque point de doctrine que je vous ai chargés d’enseigner, allez demander la solution à César.

Saint Hilaire accompagna ce triste concile à la cour, afin de proclamer les droits inaliénables de la vérité en face du servilisme arien. Les hérétiques, se voyant en nombre dans la capitale même d’un empire qui mettait son glaive à leur disposition, crurent l’occasion favorable pour tenir un concile de leur façon. On y disputa de la foi : les Ariens l’ébranlèrent jusque dans ses fondements. Mais le grand athlète était là, Hilaire adressa une requête à l’empereur. Il s’y justifiait des accusations portées contre lui par ses ennemis et demandait à Constance une audience où il lui fut permis d’exposer la foi catholique devant les évêques réunis et à la vue du peuple entier.

Dans ce plaidoyer Hilaire raillait finement la multitude de symboles contradictoires que les Ariens forgeaient tous les jours : « L’année dernière, disait-il, ils en ont produit quatre ; la foi n’est plus la foi des évangiles mais la foi des temps, ou plutôt de volontés, autant de sortes de foi. Les Ariens font paraître tous les ans et même tous les mois de nouveaux symboles pour détruire les anciens et anathématiser ceux qui y adhérèrent. »

Les hérétiques n’osèrent pas accepter le défi du saint docteur. Pour se délivrer d’un adversaire aussi terrible qui les poursuivait jusque dans leurs derniers retranchements, ils persuadèrent à l’empereur de le renvoyer dans les Gaules comme un homme qui troublait la paix de l’Orient. Constance, satisfait également de se débarrasser d’un accusateur importun, refusa l’audience que le noble Pontife lui avait demandée avec autant d’instance que de respect, et lui donna l’ordre de quitter sur le champ la capitale pour reprendre le chemin de l’Occident. L’injustice était criante, la fourberie du prince était visible. Hilaire crut qu’il n’était plus obligé à garder des ménagements avec lui, il composa un écrit plein de vigueur pour dénoncer à tous les évêques des Gaules les impiétés du tyran.

« Loup ravisseur, s’écriait-il dans une véhémente apostrophe à l’empereur, nous voyons ta peau de brebis ; tu reçois les évêques par le baiser avec lequel Jésus-Christ a été trahi ; tu baisses la tête pour recevoir leur bénédiction, mais c’est pour fouler aux pieds leur foi ; tu les fais manger avec toi pour les rendre semblables à Judas qui se leva de table pour aller vendre son Maître. Voilà la peau de brebis qui te couvre : voyons maintenant les actions du loup. » Alors le docteur traçait un tableau fidèle des cruautés de Constance envers les catholiques.

Les serpents et l’île Gallinaire

Cependant le bruit du retour d’Hilaire se répandit dans tout l’occident avec rapidité. Saint Martin qui avait appris ses vertus et ses combats voulut se faire son disciple et courut à Rome pour se mettre à sa suite et retourner avec lui à Poitiers. Mais Hilaire n’y était déjà plus : Martin sans se décourager prit le chemin des Gaules, tant l’attrait que notre Saint exerçait sur les âmes était puissant !

Pendant la traversée, le vaisseau qui portait Hilaire longea les côtes de l’île Gallinaire qui faisait l’épouvante de tous les navigateurs. Elle servait en effet de repaire à une multitude incalculable de serpents venimeux. Hilaire résolut de la délivrer de ses terribles habitants.

Il s’arme de la croix et, plein de confiance en la protection de Jésus-Christ, il met courageusement pied à terre. Les serpents ne peuvent soutenir son regard : à son approche ils prennent la fuite et vont se cacher au fond de l’île dans le creux des pierres. Hilaire, prenant alors un bâton, le plante en terre et défend aux serpents de jamais dépasser cette limite fixée à leurs funestes excursions. Et depuis ce jour, ces animaux dociles à la voix du Saint, ne franchirent jamais les bornes qu’il avait posées.

Retour d’Hilaire

Enfin Hilaire aborda aux côtes de la patrie. La Gaule tout entière, dit saint Jérôme, embrassa un héros qui revenait victorieux du combat, la palme à la main.

Mais ce fut surtout dans la ville de Poitiers que l’allégresse éclata en transports indicibles. Fortunat raconte que chacun croyait avoir retrouvé son père et même sa patrie, car durant l’absence du pasteur aimé la patrie même avait été aux yeux de tous un lieu d’exil. L’arrivée de Martin, dont Hilaire connaissait la sainteté, ne fut pas la moindre de ses consolations dans ce grand triomphe.

Saint Martin avait signalé les premiers instants de son séjour à Poitiers par la résurrection d’un enfant. Quelque temps après, un autre petit, mort sans la régénération baptismale, se trouva ainsi condamné d’un seul coup à la mort temporelle et à la mort éternelle. Sa mère vint se jeter aux genoux d’Hilaire, baignant de ses pleurs le cadavre de son pauvre enfant : « Martin qui est clerc, lui dit-elle, a ressuscité un mort, et vous qui êtes évêque, oh ! je vous en supplie, rendez mon fils à mon amour ou du moins rendez-le au baptême ! » L’homme de Dieu est ému de la douleur de cette mère. Recourant à ses armes ordinaires, il se prosterne humblement et se met en prières. Bientôt la rougeur revient sur le visage de l’enfant, la chaleur ranime ses petits membres, ses paupières s’ouvrent à la lumière du jour. Et ensemble le vieillard et l’enfant se relèvent, l’un du trépas, l’autre de sa prière.

Sainte Abra

Au retour, Hilaire s’empressa d’appeler sa fille Abra et lui demanda si elle avait résolu de se donner à l’époux immortel et divin qu’il lui avait promis et qui n’était autre que Jésus-Christ. La jeune vierge avait tout compris : son dessein était conforme aux vœux de son père. Alors Hilaire, tombant à genoux, supplia le Seigneur de cueillir cette fleur encore brillante et pure, plutôt que de la laisser ici-bas exposée au souffle mortel du monde. Quelque temps après, sainte Abra expirait doucement, sans effort, sans souffrance, entre les bras de son père, et son âme immaculée allait au paradis contracter une nouvelle union avec le Roi des anges et des vierges. Hilaire ensevelit de ses propres mains le chaste corps de sa fille.

La mère d’Abra, jalouse du bonheur de son enfant, pria son saint époux de lui obtenir la même faveur. Hilaire y consentit, et bientôt la mère suivait sa fille au royaume du ciel. C’est ainsi que le pieux évêque aimait sa famille d’une charité toute surnaturelle.

Derniers travaux d’Hilaire

A peine rétabli sur le siège de Poitiers, Hilaire, sachant que le repos n’est pas de cette terre, mit aussitôt la main à l’œuvre. Il s’agissait de relever les ruines partout amoncelées par les fureurs des Ariens. La douceur et l’indulgence furent ses moyens principaux pour ramener les égarés au giron de l’Eglise catholique.

C’est lui qui délivra les Gaules des ténèbres de l’erreur. Même après sa mort il continua auprès de notre patrie ce ministère libérateur. En effet, lorsque Clovis marchait contre l’arien Alaric, roi des Goths, il vit, au milieu de l’obscurité de la nuit, une grande lumière sortir de la basilique consacrée à saint Hilaire et s’avancer vers lui. En même temps une voix l’avertit de prier dans ce lieu vénérable et d’aller ensuite au combat. Clovis obéit à l’indication du ciel, et avant la troisième heure du jour il remportait une victoire complète sur les troupes ennemies. Ainsi le pasteur vigilant ne cessait pas même dans le tombeau de combattre les hérétiques.

Après avoir rétabli la foi catholique dans les Gaules, Hilaire passa en Italie pour délivrer cette contrée du fléau de l’erreur. Là, il rencontra un obstacle dans la personne d’Auxence, évêque arien. Ce fourbe l’accusa auprès de l’empereur Valentinien, le successeur de Constance, de troubler la paix de son Eglise, et le prince trompé obligea Hilaire à rentrer dans les Gaules.

Le saint évêque, tenu loin de son peuple par les intérêts de la foi, lui fut enfin rendu. Il reprit son ministère pastoral, continua d’expliquer à son cher troupeau les saintes Ecritures, fit un recueil d’hymnes pour être chantées dans les cérémonies, et introduisit dans son Eglise quelques pieux usages qu’il avait rapportés d’Orient.

Il fonda aussi des monastères, institua sainte Florence abbesse d’un couvent de vierges, et sur le tombeau de son épouse et de sa fille il éleva une église où il aimait à célébrer le sacrifice de la Messe. Saint Martin, d’abord comme acolyte, plus tard comme diacre, l’assistait à l’autel.

Mort et miracles d’Hilaire

Enfin épuisé par ses travaux et ses fatigues, Hilaire tomba malade. A cette nouvelle les chrétiens accoururent auprès de sa maison qu’ils entourèrent, s’informant avec anxiété des progrès du mal et pleurant la perte dont ils étaient menacés.

Au milieu de la nuit Hilaire demanda si les fidèles étaient encore groupés autour de sa demeure ; on lui répondit qu’ils s’étaient tous retirés. Alors une lumière éblouissante éclaira la chambre, ses deux disciples qui veillaient auprès de son lit en furent d’abord aveuglés. Puis son éclat diminua peu à peu et disparut tout à fait à l’instant même où l’âme d’Hilaire brisant les chaînes de ses membres s’envolait vers Dieu. C’était le 14 janvier 368.

Un grand nombre de miracles s’opéra sur la tombe et par l’intercession du saint Docteur. Il convient d’en mentionner deux ou trois pour montrer le crédit immense dont il jouit auprès du Seigneur.

Il y avait à Poitiers une jeune fille dont le corps entier était en proie à la paralysie la plus complète. Tous ses membres étaient raidis et immobiles, sa langue était liée, le son de sa voix était imperceptible, ses pieds nous dit Fortunat, ne soutenaient plus que des membres en ruine, et dans ce cadavre apparent les yeux seuls indiquaient que la vie n’était pas tout à fait absente. Au jour où l’Eglise célèbre la fête de saint Hilaire, on la porta à l’église. Ses parents commencèrent à demander sa guérison au puissant évêque qui avait accompli déjà tant de prodiges. Tout à coup l’enfant se lève pleine de mouvement et de vigueur, ses pieds se consolident, sa langue se délie. Sa première parole fut pour demander du lait, ajoute l’historien, absolument comme si elle était venue au monde un instant auparavant.

Deux lépreux, remplis de confiance en la protection de saint Hilaire, s’oignirent le corps avec la poussière prise dans son tombeau. La première fois ils ne ressentirent aucun soulagement ! Mais ils furent persévérants et renouvelèrent souvent cet acte de ferveur et de foi. Le Saint les en récompensa : à la fin les plaies dont ils étaient couverts disparurent complètement et leur peau horriblement maculée reprit son ancienne pureté. Les deux lépreux reconnaissants devinrent, l’un diacre, l’autre sous-diacre, et s’appliquèrent, jusqu’à la fin de leurs jours, à exalter leur céleste bienfaiteur.

L’Eglise de Poitiers a de temps immémorial honoré son glorieux père sous le titre de docteur. De nos jours, à la demande de Mgr Donnet archevêque de Bordeaux, de Mgr Pie illustre successeur de saint Hilaire, et des autres évêques de la province d’Aquitaine, Pie IX a déclaré le valeureux champion de la foi Docteur de l’Eglise universelle.