Saint Barnabé

Fête le 11 juin


Légende de la gravure

Saint Barnabé compagnon de saint Paul et dont les disciples se continuent sous le nom de Barnabites est lapidé par ces Juifs de Chypre près de la Synagogue.


Le lévite Joseph à l’école de Gamaliel

Saint Barnabé était Juif, de la tribu de Lévi. Il comptait parmi ses ancêtres Moïse, Aaron et Samuel.

Il reçut le jour dans l’île de Chypre où ses aïeux s’étaient réfugiés lors de l’invasion de la Judée par les Romains, sous la conduite de Pompée.

Les grands biens qu’ils y avaient acquis, joints à ceux qu’ils possédaient aux environs de Jérusalem, faisaient passer leur famille pour une des familles les plus opulentes des Hébreux. Rien n’égalait cependant le trésor que Dieu venait de confier à leur garde, le fils qui devait porter le nom de Jésus-Christ devant toutes les nations de la terre.

Il fut appelé Joseph, c’est-à-dire accroissement.

De bonne heure il montra de grandes dispositions pour la science et une inclination merveilleuse pour la vertu.

Ses parents n’épargnèrent rien pour seconder un si beau naturel, et le jeune Joseph fut envoyé à Jérusalem pour y faire ses études sous le célèbre Gamaliel, ce fameux docteur qui, selon les traditions talmudiques, emporta dans le tombeau l’honneur de la loi.

L’illustre rabbi comptait plus de mille disciples dans son école. A leur tête un jeune Cilicien, nommé Paul, se distinguait par son zèle, sa science et la pureté de sa vie. On le voyait tous les jours au temple avec Etienne, le futur diacre qui devait répandre le premier son sang pour Jésus-Christ. Joseph était à peu près de leur âge. Il se lia avec eux d’une étroite amitié.

Joseph s’attache aux pas du divin Maître

Cependant le Sauveur commençait à remplir la Judée de ses prodiges. Le jeune lévite eut occasion de l’entendre parler dans le temple, et il fut ébranlé. Le miracle de la piscine probatique auquel il assista ne lui laissa plus de doute, il crut à la mission de Jésus-Christ, et, se jetant à ses pieds, il le supplia de l’admettre au nombre de ses disciples. Jésus l’accueillit avec bonté, et le mit au rang de ses plus intimes amis.

La joie de Joseph fut grande ; il courut en faire part à sa tante Marie, mère de Jean-Marc. A sa parole toute la famille se convertit, et cette sainte maison devint l’asile du Sauveur à Jérusalem.

Dès lors Joseph ne se sépare plus du Divin Maître. Il le suit en Galilée, et Jésus-Christ, pour lui témoigner sa confiance, le met à la tête des soixante-douze disciples.

Joseph reçoit de saint Pierre le nom de Barnabé.

Joseph donna le premier l’exemple de ce détachement admirable qui faisait dire à saint Jean Chrysostôme que l’Eglise de Jérusalem offrait à son berceau le spectacle de la république des Anges. Il vendit toutes ses terres, et en rapporta le prix aux pieds des Apôtres. Son désintéressement fut bientôt imité par la multitude des fidèles qui n’avaient qu’un seul cœur et qu’une seule âme, disent les Actes. Et cependant personne ne les obligeait, ils donnaient de leur plein gré, pour servir plus librement Jésus-Christ et secourir leurs frères.

Ce miracle de générosité volontaire et désintéressée remplissait de consolation le cœur des Apôtres, et augmenta leur affection pour Joseph, auquel ils donnèrent le surnom de Barnabé, c’est-à-dire enfant de consolation. C’est sous ce beau titre que le monde entier vénère le compagnon de saint Paul.

Barnabé présente aux Apôtres Paul converti

Quand l’Eglise, animée du souffle de l’Esprit Saint, se fut manifestée en face de la Synagogue, Barnabé eut part à toutes les tribulations de ses frères. Les Pharisiens et les Saducéens du grand conseil qui trouvaient dans les institutions mosaïques la satisfaction de tous leurs intérêts, ne pouvaient entendre, sans un frémissement de rage, proclamer la divinité de ce Jésus qu’ils avaient crucifié. Le diacre Etienne n’hésita pas à imprimer sur la face de ses hypocrites de la légalité les stigmates d’une flétrissure immortelle. Son courage lui mérita d’être la première victime de leur fureur. La populace se rua sur lui et l’entraîna hors de la ville pour le lapider. « Les témoins, disent les Actes, déposèrent leurs manteaux auprès d’un homme, jeune encore, dont le nom était Paul. »

C’était l’ancien condisciple d’Etienne. Caractère ardent, il s’était laissé séduire par l’apparente austérité des Pharisiens, avait embrassé leur secte, et était devenu un violent persécuteur de l’Eglise naissante. Il entrait à force armée dans les maisons des fidèles, saisissait hommes et femmes et les traînait en prison.

Barnabé eut plusieurs conférences avec lui, lui prouva d’une manière invincible la divinité de Jésus-Christ et le convainquit, mais il ne le convertit point. Jésus-Christ se réservait cette conquête.

Elle eut lieu sur le chemin de Damas où Paul, ne respirant que menaces et carnage contre les disciples du Seigneur, tomba foudroyé par la grâce.

De retour à Jérusalem, Paul cherchait à se joindre aux frères, mais ils le redoutaient, ne pouvant croire qu’il eût embrassé la foi et toutes les assemblées lui restèrent interdites. Barnabé, son ami d’enfance, fut le seul qui lui ouvrit sa demeure. Après avoir entendu de sa bouche le récit les merveilles opérées à Damas, il présenta le nouvel élu du Seigneur à Pierre, le chef de l’Eglise, et à Jacques, l’évêque de Jérusalem.

Le crédit de Barnabé était grand ; sur sa parole, Paul fut admis dans la société des frères, et l’Apôtre des gentils commença aussitôt l’exercice de sa mission dans la ville sainte.

Paul et Barnabé à Antioche

Cependant les fidèles, dispersés par la persécution s’en allèrent de tous côtés semant la parole évangélique. Antioche en reçut plusieurs dans ses murs et ne tarda pas à fournir des catéchumènes. Cette chrétienté naissante avait besoin d’un chef : Barnabé fut délégué et partit aussitôt.

Sous sa direction, l’église d’Antioche progressa merveilleusement ; il eut bientôt besoin de nouveaux ouvriers pour recueillir une si abondante moisson et Barnabé partit pour Tarse d’où il ramena Paul ; pendant un an Paul et Barnabé unirent leurs efforts et convertirent une multitude d’habitants. Ce fut à Antioche que les disciples reçurent pour la première fois le nom de chrétiens.

« En ces jours-là, dit saint Luc, des prophètes de Jérusalem vinrent à Antioche. L’un d’eux, nommé Agab, inspiré par l’Esprit Saint, se leva et prédit qu’une grande famine désolerait bientôt l’univers. Elle arriva en effet sous l’empereur Claude. Tous les disciples, prévoyant les besoins où allaient se trouver les fidèles de Judée, résolurent d’envoyer, chacun selon ses moyens, de quoi les secourir, et prièrent saint Barnabé et saint Paul de leur porter eux-mêmes ces aumônes. A leur retour les deux apôtres ramenèrent à Antioche Jean-Marc, le cousin de Barnabé. »

Première mission

Les ministres du Seigneur s’étant assemblés afin de célébrer les Mystères, le Saint-Esprit leur dit : « Séparez-moi Paul et Barnabé pour l’œuvre à laquelle je les ai appelés. »

Alors, après un jeûne solennel et de longues prières, ils imposèrent les mains aux deux élus, leur conférèrent la dignité épiscopale, et les abandonnèrent à la direction céleste.

Les deux envoyés de l’Esprit Saint prirent avec eux Jean-Marc et se rendirent à Séleucie d’où ils s’embarquèrent pour Chypre. Ce fut là qu’ils commencèrent leur apostolat, la parole évangélique retentit dans cette île de la volupté, ébranlant les portiques des temples de Vénus, et renversant les immondes divinités.

Les deux apôtres prêchèrent Jésus-Christ avec un égal succès à Salamine et à Paphos. Dans cette île résidait le proconsul romain, Sergius Paulus, homme plein de sagesse, disent les Livres saints. Celui-ci manda Paul et Barnabé pour apprendre de leur bouche la religion du Christ. Un magicien juif, nommé Elymas, qui se trouvait dans la maison de Paulus, cherchait à détourner le proconsul de la foi. Rempli de l’Esprit Saint, Paul fixa son regard sur lui :

- Esprit de mensonge et de perfidie, fils de Satan, ne cesseras-tu point de pervertir les voies droites du Seigneur ? Voici que la main de Dieu est sur toi : tu seras aveugle et pendant un certain temps tu ne verras plus la lumière du jour.

A l’instant même les yeux d’Elymas se voilèrent, et, témoin de ce miracle, le proconsul embrassa la foi.

Ce fut alors que Saul s’emparant du nom de ce proconsul qu’il venait de conquérir à Jésus-Christ échangea le nom juif qu’il tenait de ses aïeux contre celui de Paul, que portait ce proconsul. Celui-ci persévéra dans la foi, et mourut évêque de Narbonne.

Les apôtres de Perga

De Chypre Paul et Barnabé se rendirent à Perga, ville de Pamphylie et de là à Antioche de Pisidie.

Un jour de sabbat ils entrèrent dans la synagogue et s’assirent au milieu des Juifs. Après la lecture de la loi et des prophètes, les princes de l’assemblée apercevant des frères étrangers, les invitèrent à prendre la parole. Paul fit une belle exhortation et les Juifs en furent si satisfaits qu’ils prièrent les apôtres de revenir au prochain sabbat parler encore sur le même sujet.

Au jour indiqué toute la ville se trouva dans la synagogue ; les rabbins en conçurent une telle jalousie qu’ils éclatèrent en blasphèmes contre la doctrine de Paul.

- Puisque vous refusez d’entendre la parole de Dieu, leur dirent les apôtres, nous allons nous tourner vers les gentils.

En effet, la parole du Seigneur se répandit comme une semence féconde dans tout le pays. De plus en plus irrités, les Juifs firent éclater une persécution violente contre Paul et Barnabé et ils furent expulsés de la province. Les apôtres secouant sur eux la poussière de leurs pieds, vinrent à Icone.

Cependant Jean-Marc commençait à se rebuter des fatigues de l’Apostolat. Les périls continuels que couraient les apôtres achevèrent de l’ébranler, et quittant ses compagnons, il retourna auprès de sa mère à Jérusalem. L’absence de ce cher disciple de saint Barnabé fut un surcroît de peines pour les deux apôtres qui, ne voulant être à charge à personne, pourvoyaient à leurs propres besoins par le travail de leurs mains. Ils continuèrent leur voyage à travers l’Asie.

Le boiteux guéri – Apothéose - Lapidation

D’Icone où ils faillirent être lapidés par les Juifs, ils allèrent porter l’Evangile à Lystre, ville de Lycaonie.

« Un infirme, privé dès sa naissance de l’usage des jambes, était assis à l’entrée de la ville et écoutait la prédication de Paul. L’apôtre fixa sur lui son regard et vit qu’il avait la foi.

- Lève-toi, lui dit-il, tiens-toi debout sur tes pieds.

Et l’infirme se leva guéri.

La foule, témoin de ce prodige, éclata en cris d’enthousiasme.

- Des dieux sont descendus parmi nous sous une forme humaine, disaient-ils dans leur idiome. Ils appelaient Barnabé Jupiter, et Paul Mercure, parce que c’était Paul qui avait porté la parole. Un prêtre de Jupiter qui se trouvait là, apporta des couronnes, fit amener des taureaux, et voulait avec le peuple les offrir en sacrifice aux deux divinités.

A ce spectacle les apôtres, déchirant leur tunique, se jetèrent parmi la foule en criant :

« Amis, qu’allez-vous faire ? nous sommes des mortels, des hommes comme vous !

Nous venons vous arracher à ces vaines superstitions et vous convertirent au Dieu vivant qui a créé les cieux, la terre, les mers, le monde entier ! Du haut du ciel il répand ses bienfaits, dispense les pluies et les saisons fécondes et remplit nos cœurs d’allégresse par l’abondance de ses dons. »

Malgré ces exhortations, ils eurent beaucoup de peine à empêcher la foule d’accomplir un sacrifice en leur honneur.

Cependant quelques Juifs accourus d’Antioche de Pisidie et d’Icone réussirent à soulever la multitude dans un sens opposé.

Une émeute éclata et Paul, traîné hors de la ville par la populace furieuse fut accablé d’une grêle de pierres et laissé pour mort sur la place. Les disciples vinrent chercher son corps, mais quand ils l’eurent entouré, Paul se leva plein de vie et revint à Lystre, d’où il partit le lendemain avec Barnabé pour Derbée (1).

Ils revinrent ensuite sur leurs pas, visitèrent les églises qu’ils avaient déjà évangélisées, fortifiant partout le courage des néophytes et les exhortant à persévérer.

Ils arrivèrent ainsi à Attalie d’où ils s’embarquèrent pour retourner à Antioche.

Premier concile de Jérusalem. – Séparation de Paul et de Barnabé

Quelque temps après leur retour, Paul et Barnabé durent se rendre à Jérusalem pour assister au premier concile que présida l’oracle de l’Eglise, l’apôtre Pierre. Dans cette auguste assemblée, les deux saints racontèrent publiquement les progrès surprenants que la foi faisait tous les jours parmi les gentils. Au récit de tant de merveilles, Jean-Marc, cousin de saint Barnabé, se repentit de son inconstance et de sa lâcheté. Il protesta qu’il ne le quitterait plus et le suivit à Antioche.

Là Paul et Barnabé se séparèrent. Paul, ayant pris Silas pour compagnon, tourna du côté de l’Asie, tandis que Barnabé, suivi de Jean-Marc, faisait voile pour l’île de Chypre.

Ils l’eurent bientôt conquise en grande partie à Jésus-Christ. Mais le zèle de Barnabé était trop grand pour être resserré dans une île, comme son divin Maître, il avait soif des âmes, et l’on assure qu’il vint jusqu’en Italie ; la célèbre église de Milan se glorifie de l’avoir eu pour son premier apôtre.

Ils prêcha aussi l’Evangile dans les villes d’alentour, passa en Egypte, annonça Jésus crucifié à l’orgueilleuse Alexandrie, et revint en Chypre pour y revoir encore une fois la chrétienté qu’il y avait établie. Sa joie fut grande quand il vit le nombre des chrétiens augmenté. Il parcourut de nouveau l’île dans tous les sens, et s’arrêta enfin à Salamine qui en était la capitale.

Martyre de saint Barnabé

Il ne manquait plus à la gloire de ce grand saint que de couronner par le martyre les travaux de son apostolat.

Les Juifs habitaient en grand nombre à Salamine. Les conversions que les apôtres faisaient par leurs prédications, les humiliations qu’ils infligeaient aux Juifs dans les discussions publiques excitèrent les haines de la synagogue qui résolut de les mettre à mort.

Saint Barnabé eut connaissance du complot ; aussitôt il réunit les fidèles pour les prémunir contre les faux docteurs et, après avoir célébré devant eux les saints mystères, il prit la parole et annonça au peuple assemblé les combats qu’il allait soutenir pour le Seigneur Jésus, et l’espérance qu’il avait d’être bientôt martyr.

Je vais sceller de mon sang, leur dit-il, la foi que je vous ai annoncée. Les Juifs m’attendent pour me faire mourir. Tenez-vous prêts à m’imiter dans mon martyre, comme vous m’avez imité dans ma croyance, car la fureur des loups ne s’attaque d’abord au pasteur qu’afin de pouvoir ensuite plus aisément dévaster le troupeau. La persécution va se déchaîner sur cette Eglise si chère à mon cœur, mais j’ose espérer la défaite de l’enfer quand je vois l’effusion de l’Esprit-Saint répandue sur vous dans la plénitude. Par la foi vous êtes devenus des hommes nouveaux, une création complètement neuve : que votre cœur soit toujours le temple de l’Esprit de vie. Deux routes s’offrent à vous, celle de la lumière et celle des ténèbres.

L’homme instruit par la révélation de Dieu pourrait-il hésiter à suivre la voie de lumière et à marcher dans les commandements du Seigneur ?

La gloire attend le serviteur fidèle dans le royaume céleste, l’impie qui aura suivi l’autre route périra avec ses œuvres. Voilà pourquoi il y aura une résurrection finale. Je vous conjure donc de persévérer dans le bien déjà commencé. Ne vous laissez pas ébranler par les tourments, si les tourments se présentent, soyez fermes dans la foi et dans l’observation des préceptes et vous obtiendrez une récompense éternelle. D’ailleurs, je ne vous abandonnerai pas ; absent, je serai toujours au milieu de vous, je vous protégerai du haut du ciel.

Les chrétiens fondaient en larmes et suppliaient le saint apôtre de fuir la persécution, mais ce fut en vain.

Barnabé, fortifié par la présence de Notre-Seigneur qu’il vient de recevoir, entre généreusement dans la synagogue pour y prêcher à son ordinaire ; mais à peine a-t-il ouvert la bouche, que les Juifs, écumant de rage, se jettent sur lui, lui font subir les traitements les plus ignominieux, le traînent hors de la ville et le lapident comme un blasphémateur.

Leur fureur n’était pas encore satisfaite : voulant détruire jusqu’aux moindres vestiges du saint martyr, ils le jettent sur un grand bûcher pour réduire son corps en cendres. Mais les flammes respectèrent ces dépouilles sacrées.

La nuit venue, Jean-Marc vint les enlever et les ensevelit secrètement dans une caverne des environs de Salamine.

Il nous reste de saint Barnabé une magnifique lettre aux chrétiens de son temps, dans laquelle il expose le caractère de la loi ancienne et celui de la nouvelle ; il montre comment la loi de Moïse n’était que la préparation et la figure de la loi de Jésus-Christ. Puis il exhorte les fidèles à se rendre dignes par une vie vraiment chrétienne du royaume éternel que Jésus-Christ a conquis pour eux.

--- Note --------------------------------

(1) Actes des Apôtres.

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