Saint Ambroise

Fête le 7 novembre


Saint Ambroise naquit dans les Gaules, vers 335, d’une famille qui avait donné à l’Eglise une martyre, sainte Sotère, pendant la persécution de Dioclétien. Son père, alors préfet de la province, accueillit le nouveau-né avec de grandes marques d’allégresse ; il comptait lui léguer avec son immense fortune la charge dont il était investi ; mais Dieu réservait à une mission plus haute l’enfant prédestiné.

Il était encore au berceau, et il dormait un jour dans la cour du palais quand les abeilles vinrent voltiger autour de lui, et, pénétrant dans sa bouche ouverte, elles semblaient y puiser leur miel. Une servante accourut pour chasser ces insectes importuns, mais le père d’Ambroise frappé par l’étrangeté de ce spectacle, l’arrêta. Bientôt les abeilles, prenant leurs essors, s’envolèrent si haut qu’on les perdit de vue. Le préfet des Gaules, tout entier à ses ambitions mondaines, ne comprit pas le sens de ce signe merveilleux, et il s’écria plein de joie : « Mon fils occupera les rangs les plus élevés de l’empire. »

Quelques années plus tard, Ambroise, mieux inspiré, devait annoncer qu’il n’était pas fait pour les honneurs de la terre. Dans une solennité, comme l’enfant voyait sa mère et sa sœur baiser la main de l’évêque, il se tourna vers elles, et, d’une voix pleine d’autorité : « Baisez-moi aussi la main, je serai aussi évêque un jour. »

A la mort du préfet des Gaules le jeune homme vint étudier à Rome, sous la direction de jurisconsultes célèbres. Au milieu de la corruption qui régnait dans les écoles, l’étudiant sut mépriser les séductions de la grande ville, et, malgré les attaques réitérées du démon, il conserva toujours intacte sa virginité.

Sa science et sa vertu ne tardèrent pas à attirer sur lui l’attention publique. Symmaque, le plus illustre des orateurs de Rome, se fit gloire de rechercher son amitié, et l’empereur Valentinien ne crut pouvoir dignement récompenser ses mérites qu’en lui confiant le gouvernement de Milan.

Cette ville se trouvait en ce moment dans une situation déplorable. Un arien, Auxence, soutenu par l’influence impériale, avait chassé l’évêque légitime Saint-Denis, qui était allé mourir en exil sur les côtes de l’Asie. Pendant vingt ans, le loup qui avait ravi la houlette du pasteur opprima le troupeau ; enfin l’intrus, frappé par la colère divine, mourut sur son siège usurpé, sans avoir donné aucune marque de repentir.

A la nouvelle de cet événement, l’émotion est grande dans la ville ; les évêques de la province, afin de pourvoir à la vacance du siège, se réunissent dans l’Eglise, dont le peuple envahit les abords. Les Catholiques, après vingt ans d’une attente pleine d’angoisses, demandaient énergiquement qu’on leur donnât enfin un pasteur ; les hérétiques réclamaient à hauts cris, et ils menaçaient d’imposer encore une fois leur candidat par la force.

Le tumulte prenait des proportions inquiétantes, et le sang était prêt à couler, quand le gouverneur parut sur la place publique. A la vue de ce magistrat que tout le monde avait appris à aimer, cette multitude s’apaise, et Ambroise peut haranguer la foule et lui conseiller d’attendre en paix la décision des évêques. Il parlait encore lorsqu’un enfant s’écria : « Vive Ambroise, c’est lui qui est le véritable évêque. »

De tous les côtés répond l’immense clameur : « Ambroise évêque, Ambroise évêque. » Le cri vainqueur pénètre dans la basilique au milieu des intrigues impuissantes, et d’une voix unanime le clergé proclame Ambroise métropolitain de Milan.

En vain le noble praticien objecte-t-il qu’il n’est encore que catéchumène ; on n’écoute pas ses protestations. Alors, prenant une résolution soudaine, le préfet se fraye un passage jusqu’au prétoire, et là, il prend place sur son tribunal, et avant même d’interroger les accusés, ordonne qu’on les mette à la torture. Jamais, depuis qu’il était gouverneur de Milan, il n’avait pris une pareille décision. Cette cruauté affectée ne désarme pas la foule, et ce cri fait retentir les voûtes du prétoire : « Que votre faute retombe sur nous, Ambroise évêque ! »

Le gouverneur essaye une seconde fois de soulever l’indignation populaire. Il envoie ses licteurs ramasser dans leurs retraites infâmes les filles de mauvaise vie, et cet étrange cortège traverse les rangs pressés de la foule surprise, et il est conduit publiquement au palais. Le peuple ne cesse de répéter : « Sur nous soit votre péché, Ambroise évêque ! »

Durant la nuit, Ambroise sort furtivement du palais et s’élance à cheval hors de la ville. Mais l’ange de l’Eglise de Milan le détourne de sa route, et le lendemain quand il se croit arrivé aux portes de Pavie, il se trouve au milieu de son peuple qui acclame le pasteur que Dieu lui a rendu.

Pressé par les sollicitations de tous, le préfet emploie un dernier stratagème. « Je suis fonctionnaire de l’empire, s’écrie-t-il, l’empereur m’a confié la fonction que je remplis, lui seul peut m’en décharger ; j’en appelle à César. » La foule ne se laisse pas troubler sur cette protestation, et aussitôt une députation est envoyée à Valentinien pour lui demander son adhésion. César ratifia le jugement du peuple, et Ambroise, vaincu, après avoir été promu aux ordres inférieurs, reçut l’onction épiscopale le 7 décembre 374.

Il était nécessaire de renouer la tradition catholique, brisée sur un schisme de vingt ans ; le nouvel évêque le comprit, et il envoya une députation réclamer le corps de saint Denis, son légitime prédécesseur, au métropolitain de Césarée saint Basile. Cet acte de réparation combla de joie les fidèles ; le schisme avait cessé dans l’Eglise de Milan.

Cependant le monde catholique gémissait sous le joug de l’arianisme, lorsqu’un événement inattendu vint changer la face des choses.

Le principal fauteur de l’hérésie, l’empereur Valens engagea contre les Goths une grande bataille sous les murs d’Andrinople, ses légions furent taillées en pièces, et lui-même périt dans la fuite. A la nouvelle de ce désastre, l’héritier présomptif de la couronne, Gratien, prince de vingt ans, comprit qu’il était impuissant à relever le prestige des armes romaines, et, s’associant à l’empire un illustre général, Théodose, il lui confia le gouvernement de l’Orient.

Sous l’impulsion des deux empereurs, l’armée fut réorganisée, la défaite d’Andrinople vengée, et Gratien vainqueur des Allemands, vint s’établir à Milan, auprès d’Ambroise.

Le jeune prince, loin de suivre les errements de Valens, fit appel à l’expérience consommée du grand docteur, et, se mettant complètement sous sa direction, il promulgua contre le paganisme et l’hérésie des lois vraiment empreintes d’un esprit chrétien.

L’arianisme n’était pas encore abattu ; il comptait à la cour une puissante protectrice en la personne de la mère de l’empereur, Justina.

A la mort de l’évêque arien de Sirmium, le clergé et le peuple élirent un prêtre catholique, Anémius. La princesse, qui se trouvait alors dans cette ville, protesta contre cette élection, et il fallut qu’Ambroise lui-même accourût pour sacrer le nouvel évêque. N’osant résister ouvertement, Justina organisa une émeute. Le jour du sacre, la basilique fut envahie, Ambroise est entouré par une bande de sicaires et une femme saisissant le pan de son manteau le désigne aux coups des assassins. Sans essayer de se défendre, le pontife se tourne vers la malheureuse. « Quelque indigne que je sois du rang que j’occupe, dit-il, je suis évêque. Il ne vous appartient pas de porter la main sur moi. Prenez garde d’encourir le châtiment que Dieu réserve aux sacrilèges. » La femme épouvantée, lâcha prise. Quelques jours plus tard elle était emportée par une maladie soudaine.

Ce terrible châtiment n’ouvrit pas les yeux de la princesse. Un nouveau désastre allait lui permettre de prendre en main d’une manière plus active la cause de l’arianisme.

Le gouverneur de la Grande-Bretagne, Maxime, se révolta tout à coup contre l’autorité impériale, et, se revêtant de la pourpre, débarqua dans les Gaules. Gratien combattait alors les Allemands. A la nouvelle de cette défection, il marcha à la rencontre de ce nouvel ennemi ; mais, abandonné par ses soldats, il fut trahi par le gouverneur de Lyon, qui offrit la tête sanglante de son maître à l’usurpateur. Ambroise pleura dans une homélie touchante la mort de ce prince, qu’il considérait comme un fils, et il flétrit avec des accents indignés ce crime qui plongeait dans le deuil toute l’Italie.

Le frère de Gratien, un enfant de douze ans, fut proclamé empereur sous le nom de Valentinien II, et Justina, sa mère, nommée régente, prit le gouvernement de l’Occident.

Cependant Maxime poursuivait sa marche victorieuse, que les légions d’Italie étaient impuissantes à repousser. Dans cette extrémité la régente eut recours au patriotisme d’Ambroise. Elle pénétra dans la maison toujours ouverte du saint, et présentant son fils : « Vous seul pouvez le défendre ; soyez le père de l’orphelin. » - « Je pris ce royal enfant dans mes bras, raconte Ambroise ; je le couvris de baisers. » Malgré ses répugnances, l’homme de Dieu accepta d’aller auprès du meurtrier de Gratien plaider la cause de Valentinien II. Sa mission diplomatique réussit au-delà de toutes les espérances, et l’usurpateur renonça à l’invasion de l’Italie.

Cette paix inespérée permit à Justina de faire éclater au grand jour ses ressentiments contre le grand évêque et son ingratitude.

L’impératrice avait amené à Milan un évêque arien le Goth Mercurius. Elle fit construire dans les dépendances des écuries impériales un oratoire, où se réunirent bientôt les adeptes de la secte. Les courtisans et les fonctionnaires embrassèrent en masse l’hérésie que patronnait la mère de l’empereur, et l’oratoire ne tarda pas à être jugé insuffisant. On approchait des fêtes pascales, et Justina, comme si elle eût voulu renouveler le schisme d’Auxence, ordonna qu’on enlèverait à l’église de Milan la basilique Portiana pour la confier à Mercurius, qui prit le nom d’Auxence II.

Le lendemain, la princesse fit venir Ambroise à l’audience impériale pour lui notifier cet ordre d’expulsion. Le peuple, ne voulant pas délaisser son pasteur en ce moment critique, se porte en masse à la suite de son évêque, et, malgré la résistance des gardes, pénètre dans le palais. A la vue de cette multitude, Justina perd toute son arrogance, elle se jette aux pieds du pontife et promet de renoncer à sa tentative sacrilège.

Quelques heures plus tard, on affichait un ordre impérial qui donnait aux hérétiques l’Eglise métropolitaine.

Un officier se rendit auprès d’Ambroise, et lui présentant le décret qu’on avait fait signer à Valentinien II : « Telle est, ajouta-t-il, la volonté irrévocable de l’empereur. Ayez soins de vous y conformer. » - «  Allez dire à votre maître, répondit le saint, qu’un évêque ne livrera jamais le temple de Dieu. »

La semaine sainte commençait et les fidèles étaient réunis à la cathédrale, où l’évêque célébrait la messe, lorsqu’on apprit que les troupes se portaient vers la basilique Portiana. « En un instant, raconte le saint, le peuple entier m’abandonna. Tous volèrent à la défense du temple menacé ; je demeurai seul avec mes prêtres et mes diacres. » Justina n’osa pas affronter l’indignation populaire. Elle ne renonçait pas cependant à son projet. Pendant trois jours elle fit camper ses légions en face de la cathédrale et de la basilique Portiana.

Le mercredi saint, afin d’éviter toute complication, Ambroise se rendit à une chapelle abandonnée. Il y célébrait les saints mystères, lorsqu’on vint annoncer que les soldats envahissaient les deux basiliques menacées. A cette nouvelle, le pontife monte à l’ambon et, d’une voix vibrante : « Allez dénoncer aux violateurs du temple saint que l’évêque de Milan excommunie tous ceux qui prendront part au sacrilège. » L’ordre est exécuté sur-le-champ. Ambroise continuait à parler, quand une troupe de soldat envahit l’église. L’effroi était à son comble et l’on craignait que le sang ne souillât le temple de Dieu ; on fut bientôt rassuré. Les soldats, effrayés par la menace d’excommunication, avaient abandonné leurs chefs et ils venaient se prosterner aux pieds de l’évêque et implorer le pardon.

L’impératrice vaincue, fut obligée de rapporter son décret. Cependant elle ne renonça pas à la lutte et, quelques mois après, elle transmettait au saint un ordre ainsi conçu : « L’empereur vous exile, sortez de Milan ; allez où vous voudrez. » - Ambroise répondit qu’il n’obéirait qu’à la violence ; et comme les pauvres s’empressaient autour de lui : « Voilà mes défenseurs, disait-il. On me reproche de rechercher leurs suffrages par mes aumônes, je ne m’en défends pas. Oui, tout mon espoir est dans la prière des pauvres, ces aveugles, ces boiteux, ces infirmes sont plus puissants que tous les gens de guerre. »

La semaine sainte approchait et l’impératrice, renouvelant ses tentatives sacrilèges de l’année précédente, voulut donner la cathédrale aux ariens. Pendant huit jours les soldats cernèrent la cathédrale, où le peuple s’était réunit menaçant. On engageait le saint à repousser la violence par la force. « Je ne résisterai pas à la force ouverte, répondit-il ; un évêque n’est pas un gladiateur. Contre les soldats et les Goths, je n’ai d’autres armes que mes pleurs ; mais je ne fuirai pas, je ne déserterai pas l’église ; tout mon sang sera versé pour elle. »

Le peuple voulut partager la captivité volontaire de son évêque, et il s’enferma aussi dans la basilique.

La prière du peuple triompha de la persistance des ariens, et, le samedi saint, le pontife, selon la coutume de l’Eglise à cette époque, put donner le baptême aux catéchumènes. Dans la foule des nouveaux baptisés, un jeune homme attirait tous les regards : c’était saint Augustin. A sa vue, Ambroise s’arrête, et, dans une inspiration soudaine, il entonne le Te Deum ; Augustin, inspiré, lui aussi, reprend l’hymne commencée, et les deux docteurs continuent tour à tour ce colloque que les anges seuls ont pu dicter et que l’Eglise a pris pour son chant de victoire.

Arrêtée par l’invincible fermeté du pontife, l’impératrice, obligée de respecter la basilique de Milan, eut recours à d’autres moyens pour se procurer la victoire. Un scélérat, dont elle avait payé le crime, s’introduit jusque dans la chambre d’Ambroise. Il s’approche du lit, et, levant le bras, il s’apprêtait à frapper. Soudain il s’arrête et pousse un cri formidable, son bras venait d’être atteint de paralysie. On accourt, on saisit le meurtrier, qui se jette à genoux et obtient de l’homme de Dieu, avec le pardon de sa faute, la guérison complète.

L’instigatrice du crime, Justina, ne devait pas attendre longtemps le châtiment. L’usurpateur Maxime envahit l’Italie, et l’impératrice fut obligée de s’enfuir précipitamment et d’aller chercher un refuge à la cour de Théodose.

L’empereur d’Orient prit vigoureusement la défense des fugitifs, et quelques mois après, vainqueur de Maxime, il franchissait les Alpes et venait se fixer à Milan, où se trouvait la résidence impériale. Il répara bientôt les désastres causés par l’administration de Justina et par l’invasion de Maxime, et il fit bénir son nom par les populations de l’Italie.

Au milieu de cette paix générale, un incident inattendu manqua de soulever de nouveaux orages contre saint Ambroise.

La ville de Thessalonique avait pris les armes pour défendre un écuyer de mœurs infâmes qu’on avait donné l’ordre d’arrêter. Dans l’émeute, le gouverneur et les magistrats impériaux furent lapidés. A la nouvelle de cet attentat, Théodose, malgré les représentations du saint, jura de frapper les esprits par un exemple terrible, et il donna l’ordre d’anéantir la ville coupable. Le peuple de Thessalonique fut convoqué au cirque, comme pour une fête, mais au lieu du signal du jeu, ce fut le signal du massacre que l’on donna : sept mille victimes tombèrent sous le sabre des soldats.

A la suite de cette sanglante exécution, l’empereur, n’osant enfreindre l’excommunication que le métropolitain avait lancée contre les coupables s’abstint de paraître aux offices divins. Cependant la fête de Noël approchait, et Théodose, ne voulant être séparé plus longtemps des fidèles, se présenta aux portes de la basilique.

A ce moment solennel, Ambroise n’hésita pas. Revêtu de ses ornements pontificaux, il s’avance vers le cortège impérial, et d’une voix sévère : « Le meurtrier de Thessalonique ne peut entrer dans le temple de Dieu, les mains souillés du sang des innocents ! »

Et comme l’empereur insistait alléguant l’exemple de David qui, lui aussi, avait péché, mais obtenu le pardon : « Puisque vous avez imité David dans ses crimes, interrompt l’évêque, imitez-le aussi dans sa pénitence. »

Théodose baissa la tête. Il comprit en ce moment que la pourpre impériale et tous les insignes du pouvoir ne mettent pas à l’abri des foudres de l’Eglise, et, obéissant à la voix du pontife, il s’agenouilla sur le parvis de la basilique.

On le vit, revêtu des habits du pénitent, confesser publiquement sa faute, et ce ne fut qu’après avoir obtenu le pardon qu’il put entrer dans le sanctuaire et porter avec la foule des fidèles son offrande à l’autel.

Notre gravure représente le spectacle de cette pénitence extraordinaire qui étonna le monde. L’empereur se releva plus grand après son humiliation volontaire, et il le comprit si bien que, depuis cette époque, il ne cessa de répéter : « Je n’ai trouvé qu’un seul homme qui ne m’ait jamais déguisé la vérité, c’est l’évêque d’Ambroise. »

Cependant les travaux apostoliques du saint avaient épuisé ses forces, lorsqu’un coup terrible vint porter une nouvelle atteinte à sa santé déjà ébranlée. Théodose, emporté par une maladie soudaine, avait expiré au milieu d’une fête publique. Ambroise, brisé par la douleur, présida aux obsèques impériales, et ce fut au milieu des sanglots et des larmes qu’il prononça l’éloge du héros.

« Je l’aimais tendrement, dit-il, ce prince qui préférait la vérité à la flatterie ; cet empereur qu’on vit un jour, dans cette église, dépouiller la pourpre, se prosterner sur le pavé, déplorer sa faute et demander grâce à Dieu et aux hommes par ses gémissements et ses larmes. Les particuliers rougissent d’avoir à subir la pénitence publique, et un empereur l’a acceptée ! ... »

« Constantinople se préparait à recevoir vivant le héros vainqueur ; elle s’attendait à le revoir entouré de ses glorieuses phalanges ! Mais elle le recevra plus puissant, plus auguste, plus invincible dans la mort qu’il ne le fut durant sa vie : elle recevra un hôte du paradis, un habitant de la cité céleste. Le tombeau qu’elle lui offrira renfermera les reliques d’un saint. »

Ambroise ne devait pas survivre longtemps au héros dont il pleurait la perte.

La maladie dont il ressentait déjà les premières atteintes fit des progrès effrayants, et le saint fut obligé de s’aliter.

La nuit du samedi saint (4 avril 1375), l’évêque de Verceil, qui était venu visiter son métropolitain, était logé à l’étage supérieur de la maison, lorsqu’il entendit une voix lui dire : » Lève-toi ! il va quitter cette terre. »

Honorat se leva aussitôt. Les clercs étaient agenouillés autour du lit d’agonie. Depuis une heure, Ambroise priait, les bras en croix ; on voyait s’agiter ses lèvres, mais on ne distinguait plus ses paroles. Honorat lui donna le corps sacré du Seigneur.

A ce moment les catéchumènes se rendaient à l’église pour recevoir le baptême : ils ne devaient plus retrouver leur évêque. Ambroise était allé chanter avec les anges le Te Deum qu’il avait entonné au baptême d’Augustin.